Dernière mise à jour: 6 février 2007
Une petite prame à clins.
l était une fois une jolie princesse aux mensurations idéales, 240/45/120, enfermée dans un plateau de chêne et quelques planches de mélèze.
Novembre 2004
La fin de la construction de l'Ilur nous avait laissé soulagés de le voir flotter, mais quelque peu accros à l'odeur de copeau. Les premiers symptômes du manque se faisant sentir avec la rentrée, un nouveau projet s'imposait.
Le hangar de Nautique Sèvres était plein, et la taille de mon garage limite les dimensions du futur bébé. La nécessité pour Marivel de disposer d'une annexe digne de lui s'imposa naturellement, il s'agira donc d'une petite prame (et vous pouvez voir le résultat ici si vous êtes impatient).
Nous envisageames d'abord un modèle moderne à fond plat en contreplaqué cousu-collé. Mais la chose n'était pas vraiment excitante, et n'avait même pas l'aspect pratique de mon proutch 3 rotomoulé qui présente l'avantage de pouvoir descendre un escalier par ses propres moyens sans dommages majeurs. Accessoirement, le prix de revient du contreplaqué, de l'époxy et bricoles diverses d'un tel bateau est supérieur à celui dudit proutch prêt à flotter.
Abandonnant tout objectif bassement pragmatique, nous nous fixons donc un programme différent. Ce sera:
- Une construction traditionnelle, car nous sommes un peu saturés d'époxy.
- À clins, parce que c'est le choix le plus logique dans cette taille (autour de 2m - 2m50).
- Une prame, parce que c'est plus facile (pas de charpente, pas de râblures, formes plus douces à l'avant), et qu'il ne faut pas fixer la barre trop haut pour un premier essai.
-
Tout en visant de travailler comme au bon vieux temps,
nous acceptons de relaxer la fidélité aux
traditions en employant colles et mastics modernes dans
quelques cas strictement bornés:
- Nous utiliserons si nécessaire l'époxy pour des pièces courbes lamellées ou des panneaux assemblés en lattes, afin de pallier la difficulté à trouver du bois adéquat (bois tors, ou planches larges),
- Nous utiliserons des mastics modernes (polyuréthanes ou autres) pour remplacer les mixtures peu ragoûtantes et vaguement mystérieuses traditionnellement employées pour améliorer l'étanchéité en certains points.
- Et également partout ailleurs si nous n'arrivons pas à faire autrement .
Des plans !
Après une vague recherche, nous avons trouvé quelques candidats sympathiques:
- La petite prame Tralala! de Canotage de France, qui est bien jolie.
- Un plan proposés par l'architecte américain Paul Gartside.
- Une prame un peu plus grosse BOUNCING BETTY.
- Un plan tiré d'un livre du constructeur Anglais Geoffrey Prout, publié dans les années 30, et qui se trouve en ligne. Un constructeur Canadien a réalisé ce plan, et a décrit la construction (en bordés étroits collés sur chant) sur cette page.
Les 2 premiers plans sont rassurants, des bateaux construits à de nombreux exemplaires, des plans professionnels modernes (même si Tralala! a 60 ans), un support et des conseils disponibles. Le plan de Geoffrey Prout est un vague croquis minuscule dans un vieux livre, les indications de dimensions sont incomplètes et contradictoires. Ayant l'esprit d'aventure, c'est donc ce dernier que nous choisissons.
La petite prame à clins
J'espère que l'éditeur du livre (qui n'est plus disponible) ne m'en voudra pas de reproduire ici les 3 schémas essentiels du plan (le reste se trouve en ligne sur le lien donné plus haut).
Fig. 43 | Fig. 44 | Fig. 45 |
Le livet
La ligne de livet n'est pas explicitement spécifiée dans le livre, qui contient 3 indications vaguement contradictoires (pour le couple central):
- La figure 43 porte en légende une profondeur de 1'4", ce qui correspond à peu près à ce qu'on peut mesurer (entre 1'4" et 1'6"). Elle comporte par ailleurs de nombreuses incohérences (par exemple la vue de face ne correspond à rien).
- La figure 44 indique une hauteur du gabarit central de 1'9" (correspondant au sommet du tableau Fig.43).
- Le 3ème schéma indique une encoche pour la serre de plat-bord, à 2 pouces en dessous du bord du gabarit, donc en fonction du jeu possible (la serre fait 1"1/2 de large) une hauteur de livet entre 1'5"1/2 et 1'7".
Par ailleurs, le livre indique plus loin que la serre de bancs doit être 8"1/2 en dessous du livet, ce qui correspondrait, puisque elle est à 10 pouces du fond (Fig.45), à une hauteur de livet de 18"1/2 (1'6"1/2), ce qui est compatible avec la valeur précédente.
En conclusion, nous choisissons une valeur de 1'6" (46cm) pour la hauteur du livet au centre. Ce choix est en contradiction avec l'indication à 1'4" du schéma de la Fig. 43, mais cette dernière est par ailleurs incohérente sur ce point entre vue de face et de côté
Par des considérations analogues, les hauteurs de livet sont choisies à 49 et 50 cm à la marotte et au tableau.
Le creux de la courbe de tonture sera donc d'environ 3.5 cm, une valeur assez faible. Il sera toujours possible de faire une petite correction finale au rabot en cas de besoin (Note: au final, nous avons eu la flemme de faire la dite correction, et la tonture serait plus jolie avec quelques cm en plus, mais rien de dramatique. Si c'était à refaire, je l'accentuerais cependant de 3 cm. Le franc-bord au centre qui paraissait très faible est en fait plus que suffisant.).
Beaucoup d'agitation pour quelques centimètres ! Mais la ligne de livet est un point important de l'allure finale du bateau, il est donc préférable de se casser un peu la tête avant de commencer à couper du bois...
Au final, voici le tableau de cotes de la Fig.44, converti en centimètres et complété des hauteurs de livet.
Attention, la Fig. 44 n'est pas une vue de face des sections: tableau et marotte sont redressés, et les éléments ne sont pas à leur position verticale absolue (cf ligne du chantier "Line of stocks level" en biais).
Larg ABCDE | |||||
Haut FGHI | Marotte | Tableau | Couple | ||
0.0 | CL | 17.8 | 7.6 | 0.0 | |
15.2 | A | 25.4 | 8.9 | 0.0 | |
30.5 | B | 17.8 | 2.5 | ||
Hauteurs | 45.7 | C | 53.3 | 8.5 | |
61.0 | D | 30.5 | |||
64.8 | E | 40.6 | |||
Livet | 49.0 | 50.0 | 45.5 | ||
15.2 | F | 28.6 | 50.8 | ||
Demi- | 30.5 | G | 17.8 | 41.3 | 61.0 |
Ouvertures | 45.7 | H | 22.9 | 45.1 | 64.8 |
53.3 | I | 22.9 | 45.7 | 64.8 |
Autres éléments manquants ou dispersés
Le texte ne comprend pas de tableau d'échantillonnages bien identifié.
Nous avons exploré quelques sources pour choisir les éléments manquants:
- Construction bois, les techniques modernes, de François Vivier.
- Clenched Lap or Clinker, de Eric McKee. Cet opuscule édité par le musée national maritime Britannique en 1972 est considéré par beaucoup comme une référence au sujet de la construction traditionnelle à clins. Il n'est plus disponible mais j'en ai une copie (électronique), ainsi qu'une traduction. Vous pouvez me contacter, je vous la prêterai .
- Clinker Boatbuilding de John Leather. Ce livre est également souvent cité, il est toujours disponible.
- Le livre de Geoffrey Prout cité ci-dessus (je peux également vous prêter une traduction française du chapitre sur la prame).
Une bonne partie des références sur la construction à clins est en Anglais. Le petit lexique de Nautique-Sèvres pourra probablement vous être utile pour les lire.
- Recouvrement des clins
-
Vivier propose 18mm pour l'Ilur (CP). Prout suggère 1" (25mm). Leather de 5/8" à 3/4" (15-20mm). McKee propose 2 fois l'épaisseur, donc dans notre cas 18 à 20 mm. Valeur choisie: 20 mm
- Nombre de clins
-
McKee conseille d'utiliser environ un clin par pied de longueur pour des petits bateaux jusqu'à 12 pieds, donc dans notre cas, 8 clins de chaque côté. Geoffrey Prout n'est pas très clair sur le sujet, mais semble indiquer environ 5-7 clins. Leather indique une limite maximale de 12.5 cm de largeur pour les clins d'un petit bateau.
Le bateau faisant environ 80 cm de 1/2 circonférence au centre, et si on utilise 7 clins par côté, les clins auront une largeur moyenne de 10-11 cm au centre (apres soustraction de la sole). Cela parait raisonnable et c'est la valeur que nous retiendrons.
- Choix du bois et épaisseur des clins
-
Trois espèces de bois semblent plus particulièrement recommandés: le pin sylvestre nordique (sapin rouge), le mélèze, ou le sapin Sitka (silver Spruce). Pour des bateaux de cette taille, tous les auteurs donnent 8-10 mm d'épaisseur de bordé (5/16-3/8"). Les recherches de bois en région Parisienne ayant abouti à un plot de mélèze et à rien d'autre, ce sera du mélèze.
- Taille des rivets
-
Le bateau sera riveté avec des clous de section carrée en cuivre. Les sections sont mesurées sur le côté du carré.
McKee dit que la jauge à retenir est directement déterminée par la longueur, elle même calculée en ajoutant 13mm à l'épaisseur rivetée. Pour du bordé de 9-10 mm, cela donnerait une longueur de 30-35 mm, impliquant une section de 2mm (jauge 14). Pour les clous traversant les membrures, la section serait de 2.7mm (jauge 12)
F.Vivier donne 2.2 mm pour un bateau de cette taille. John Leather conseille de la jauge 14 pour les clins, 13 pour les membrures.
Au final, et retenant la solution McKee, je commande chez À l'abordage des clous de 2 mm (jauge 14) pour le bordé, et de 2.7 mm (jauge 12) pour les membrures.D'après le site de Classic Marine, l'avant trou idéal pour la jauge 14 devra être de 1.6mm de diamètre dans du bois dur ou 1.2mm dans du bois tendre, et 2mm ou 1.6mm pour la jauge 12. Je dois dire que la nuance entre 1.2 et 1.6 me laisse un peu rêveur...
- Nombre de rivets
-
Il y selon les sources au moins 2 approches possibles pour l'espacement des rivets. Soit on prend un intervalle de 6 fois l'épaisseur du bordé et on place 2 rivets entre chaque membrure, ce qui détermine la maille des membrures (environ 18cm avec un bordé de 10mm), soit on fixe la maille à 15 cm (6 pouces), et on place un rivet entre 2 membrures. Cette dernière approche est donnée par Prout pour la prame, et citée comme possible par McKee, et c'est donc celle que nous retenons.
- Espacement et dimensionnement des membrures
-
McKee propose en premier lieu de choisir un intervalle entre rivets de 6 fois l'épaisseur du bordé, et une maille de 3 rivets pour les membrures (donc environ une membrure tous les 18cm dans notre cas). Prout propose une maille de 15cm, qui est l'alternative régionale mentionnée par McKee. Pour l'échantillonnage, McKee donne 2 fois l'épaisseur du bordé pour la largeur et épaisseur bordé + 3 mm, donc 13x20, ce qui correspond à la valeur donnée par Prout. Nous aurons donc environ 16 membrures de 13x20 mm.
- Tableau et marotte
-
Geoffrey Prout donne des échantillonnages qui paraissent carrément délirants pour les tableaux de sa plate et de sa coque à bouchains (38mm!). Il ne donne pas de valeur pour la prame (même taille). Pour un bateau légèrement plus grand, John Leather propose 22mm d'acajou. Ce sera donc 20 mm de chêne, et 25 pour la planche supérieure..
- Serres
-
Prout donne 13x50mm pour la serre de banc, et ?x38 mm pour la serre de plat-bord. Leather donne 13x25 pour la serre de banc 19x35 pour la serre de plat-bord, mais le bateau est plus gros. McKee est muet. La serre de banc de l'Ilur fait 18x35. Tout cela me laisse perplexe... Decision: 13x50 pour la serre de banc, 13x40 pour la serre de plat-bord. Mais voir plus loin, lors de la mise en place, la largeur de la serre de banc a été réduite à 25mm.
Hauteur des serres de banc. La hauteur du banc par rapport au plat-bord est importante pour le confort de nage. Elle est déterminée par l'emplacement de la serre. Prout donne soit 7 pouces (18cm) du plat-bord au banc (20cm à la serre), soit 8 pouces 1/2 de plat-bord à serre (21.6cm). Dervin indique 18 à 30 cm. Vivier 16 à 20. Nous retenons 20 cm.
- Bancs
-
22mm sur 20 cm de large devrait convenir.
Le plan semble indiquer que l'arrière du banc est quelques centimètres en avant du centre du bateau. Dervin indique 20 à 30 cm pour la distance du bord du banc à l'aviron. Vivier donne 32 à 34 cm. Leather 11" (28cm). Les valeurs supérieures semblent correspondre à des bateaux plus grands, avec de grands avirons.
Prout n'indique pas clairement la distance, mais elle semble être d'environ 20 cm sur le plan. Il donne par ailleurs dans un autre chapitre une distance de 30 cm du centre du banc à l'aviron (confirmant donc les 20 cm à partir de l'arrière). Nous choisissons 25cm pour cette distance.
- Courbes
-
Chene 22 mm.
- Choix du bois pour les membrures
-
Les auteurs francais conseillent classiquement l'acacia (vert si possible), ou le frêne pour les membrures ployées. McKee liste l'orme canadien, le chêne anglais ou le pin de l'orégon (à condition de ne pas trop étuver ce dernier). Geoffrey Prout, outre l'orme et le chêne, ajoute le frêne, et le bouleau. Il serait bien sûr exagéré de conclure que n'importe quel bois tempéré convient, mais on ne voit pas bien qui manque à part le sapin :)
Le chantier
Geoffrey Prout propose de monter le bateau sur une simple planche. Craignant d'avoir des problèmes de rigidité avec cette approche, nous avons assemblé quelques bouts de sapin (planches 3000x140x27 mm, largeur assemblée 20cm) pour faire une poutre, et nous posons le tout sur de superbes chevalets, confectionnés à partir d'un bastaing provenant du chantier de l'Ilur.
Journal de la construction
01-2005 8H
Cogitations sur plan. En fait j'ai du y passer beaucoup plus de 8H, mais c'est difficile de distinguer le travail sur la prame du temps passé à améliorer ma culture générale et mon vocabulaire Anglais...
02-2005 4H
Tracé du couple, du tableau et de la marotte. Fait avec la même méthode que pour l'Ilur (report par pointage à travers une feuille de polyane), et en réutilisant un gabarit du même (je ne me sens pas tout à fait prêt à construire un deuxième Ilur).
02-2005 8H
Confection de la poutre de support et de deux chevalets, à partir de planches de sapin, type palissade de chantier, et d'un bastaing de l'Ilur.
03-2005 8H
Achat d'un plateau de chêne, et découpe / rabotage de planches courtes de 100 mm de large pour confection du tableau et de la marotte. Achat d'un deuxième plateau, parce qu'il en manquait dans le premier (ils étaient petits). Découpe des languettes dans un morceau de sapin qui trainait.
18-03-2005 1.5H
Assemblage et collage du tableau. Quantite de colle (resine): 45 + 45 + 30 = 120 mL pour 45-50 prevus au depart! Les rainures-languettes ca consomme (pour environ 4.2 m de joint de 20mm). En fait je pense que ça ne sert à rien avec un collage à l'époxy, mais au départ on n'était pas trop sûr d'en employer, et puis on a craqué...
20-03-2005 3H
Assemblage et collage de la marotte, poncage tableau et marotte.
23/24-03-2005 5H
Montage et alignement gabarit et marotte sur chantier.
25-03-2005 6H
Achat et transport d'un plot de mélèze. Les plateaux sont pleins de noeuds, mais c'est tout ce que j'ai trouvé en région Parisienne, et j'ai eu la flemme d'aller en chercher ailleurs. En tous cas le prix m'a paru raisonnable. Comme d'habitude, la remorque de bateau est parfaite pour cet usage. Bois acheté chez Dubot et Bredy à Vitry sur Seine.
2005-03-26 3H
Montage du tableau sur le chantier et fin d'alignement (je sais, sur les photos le fil n'est pas au milieu...).
2005-03-30 2H
Equerrage marotte et tableau.
2005-03-31 3H
Decoupe du premier bordé (la sole). Il est spécifié assez large par Prout (15 cm aux extrémités, 23 au centre), et ce n'est pas si évident à trouver dans notre petit mélèze. Le résultat est plein de noeuds, mais a l'air solide.
Par contre, en essayant de le cintrer sur la coque, nous réalisons qu'il y a un petit problème de fond: pour s'ajuster aux couples, il faudrait qu'il soit cintré transversalement en plus de sa courbe longitudinale, et, manifestement, ce n'est pas possible. Le problème est particulièrement aigu à la marotte, à cause de sa courbe plus serrée. Et Oh mystères des surfaces courbes, si on force à un bout, ça a tendance à faire cintrer l'autre en sens inverse (concave-convexe)...
Nous allons donc pratiquer des plats pour permettre à la sole de bien porter. J'hésite également à réduire un peu sa largeur à l'avant, ça ne paraît pas très logique que la sole soit aussi large à la marotte qu'au tableau, d'ailleurs, sur un Seil, ce n'est pas le cas.
2005-04 10H
J'ai pris un peu de retard sur la mise à jour du site, c'est peut-être lié au fait que nous avons beaucoup cafouillé.
Nous avons donc:
- Pratiqué les feuillures avant et
arrière dans la sole. malheureusement, nous en
avons cassé une qui a été
arrachée par un serre-joint lors d'une
libération intempestive du bordé. Au
passage, j'ai également cassé une vis
à l'arrière d'où le trou en plus.
Il faut faire un test de vissage énergique dans
un bout de rebut pour déterminer le bon
diamètre de perçage avant de visser dans
les vraies pièces.
- Brocheté et taillé la paire de clins
suivants. Pour le brochetage, nous avons utilisé
la méthode décrite par Eric McKee, qui
emploie une règle et note à la fois la
distance et la direction (un vecteur) pendant le
brochetage, ce qui est, je pense, beaucoup plus sain que
les méthodes à base de compas.
Comme cela se voit sur les photos, nous avons travaillé comme des cochons, et il y a plein de problèmes, de symétrie ("tout simplement" oublié de rajouter la largeur du recouvrement sur le clin de droite), et autres (par exemple l'arête du clin pas encore posé arrondie du mauvais côté...). Nous pourrions refaire les clins en question, mais il ne semble pas que cela soit irratrappable, et, après tout, le but est d'apprendre, pas d'avoir un bateau parfait, donc nous essaierons simplement de mieux faire sur la paire suivante. (Rétrospectivement, heureusement que nous ne les avons pas refaits, sinon nous aurions manqué de bois à la fin!).
Il y a une chose dont personne ne parle, et qui n'est pas facile, c'est de pratiquer la facette plane pour le portage du clin sur tableau ou marotte. Après divers essais, j'ai plus ou moins trouvé une vague méthode, mais c'est une opération sur laquelle nous avons peu progressé pendant la construction: je continue à la trouver difficile.
2005-05-12 5H
Nous avons riveté la première paire de clins. Un cordon de sicaflex a été déposé dans le joint. La qualité de ce dernier n'est pas encore tout à fait suffisante pour se contenter d'un peu de vernis ...
Les clins ont été rivetés au fur et à mesure de la pose. Selon la tradition ils auraient du être seulement cloués, le rivetage attendant le retournement du bateau. Nous ne pouvons pas faire de même, car il faut que le joint de sicaflex soit bien écrasé, d'où également les serre-joints sur la photo ci-dessous.
L'autre photo montre la panoplie du parfait petit riveteur, clous, coupelles, tas, marteau, bouterolle, la jauge pour tracer les lignes, et n'oubliez pas le casque anti-bruit !
2005-05-13 2H
Chanfreins et feuillures sur les 2 clins rivetés hier.
2005-05-16 2H
Brocheté et découpé les 2 clins suivants.
Distrait, pour le premier, j'ai reporté à l'avant les largeurs de l'arrière et réciproquement, et je ne m'en suis bien sûr aperçu qu'après avoir coupé... Heureusement la courbe de ce clin est raisonnablement symétrique, et après vérification, ça devrait s'adapter sans problème. Comme quoi la chance des débutants etc. il doit y avoir du vrai.
2005-05-18/19 5H
Posé la 2ème paire de clins.
2005-06/07/08 22H
Pas d'évènement notable, travail ralenti par l'été, il nous faut environ 8-10H pour fabriquer et poser une paire de clins.
Taille d'une facette pour l'arrivée d'un bordé sur le tableau ou la marotte
Ce problème qui est peu mentionné (donc
considéré comme évident?) m'aura
enquiquiné depuis le début.
Méthode: (on
travaille exclusivement au ciseau à bois large)
- Tracer a l'intérieur la corde depuis le bord du bordé précédent jusqu'au point sur la courbe du tableau correspondant à la largeur du nouveau bordé.
- Enlever le bois correspondant sur quelques millimètres en profondeur (obtenir un méplat rectiligne sur toute la corde).
- Tracer à l'arrière une droite qui part de l'intersection du bord inférieur du bordé précédent et de la face extérieure, et qui enlève en bas à peu près assez de bois (mais un peu moins) pour que le bordé arrive en contact avec l'arrête intérieure.
- Enlever le bois à l'extérieur, et se débrouiller pour enlever la 'bosse' entre les deux droites.
- Répéter en augmentant l'angle de la droite arrière jusqu'à ce que le contact soit bon à l'avant.
Brochetage d'un bordé
Une fois en place sur la coque, le bord d'un clins est une courbe en 3 dimensions. Mais, évidemment, les bordés sont découpés dans des plateaux, donc à plat. Le brochetage est l'opération qui permet de transformer la courbe dans l'espace en courbe plane. C'est plus simple que cela ne paraît de prime abord, mais, obtenir un tracé précis reste délicat. Pour les débutants comme nous, il restera de l'ajustement à faire après la découpe.
Rivetage initial d'un clin
Les quelques photos qui suivent décrivent les opérations de mise en place d'un clin. Accessoirement, durant toute la construction de la coque, nous avons employé par erreur 2 fois moins de rivets que ce qui était prévu initialement (!!). Rien de grave, nous ajouterons les manquants après les membrures, et, grâce aux pinces et au Sicaflex, les bordés sont biens plaqués et maintenus.
Cf aussi plus haut remarque sur le rivetage à ce stade.
2005-11-14
Et hop, une petite entaille en reglant les lames de la grosse raboteuse. Rien de grave heureusement, mais je garde la photo en rappel: quand on travaille sur un objet tranchant, et quand c'est possible (ce qui était le cas), il faut mettre des gants. Avec des gants, j'aurais pu continuer et raboter la dernière paire de clins (et, oui, on y est).
2005-12-15
Nous avons posé le dernier clin et retourné la bestiole pour voir à quoi elle ressemble à l'endroit. Nous nous sommes empressés de mettre un étai transversal, parce que la coque avait une forte tendance à se refermer. En fait il vaudrait mieux y penser avant d'enlever le gabarit, ca pousse assez fort.
Il faut maintenant nettoyer les coulures de mastic.
2005-12-16/2006-01-03 10H
Nettoyage des cordons de sicaflex à l'intérieur, et taille des bordés au ras du tableau et de la marotte.
J'ai aussi commencé à bricoler une étuve pour les membrures. Après avoir réfléchi à des solutions à base de réchaud et cocotte minute, ou chauffage direct au bois, il m'a semblé que la solution la plus simple était d'utiliser une décolleuse à papier peint, qui est, après tout, faite pour générer de la vapeur.
La dite décolleuse est donc connectée à un tuyau de gouttière de 80mm (récup), dont le bourrelet d'extrémité s'insère juste dans un bouchon de 100mm, percé pour recevoir un bout de tube de 14mm fixé à la pâte epoxy. Le raccord fileté de la décolleuse (16mm) est vissé sur un bourrelet de ruban adhésif adhesif metallique pour tubes de vmc (le ruban électrique ramollit à la chaleur et ne tient pas).
La décolleuse coûte 35 Euros chez Casto (pub gratuite), ce qui est plutôt moins cher que ce que j'ai vu comme réchaud à gaz d'occasion sur Ebay, et je n'ai pas envie de courir les brocanteurs...
- Attention avec la décolleuse: on pourrait croire qu'il n'y a pas du tout de pression dedans, mais en fait il y en a suffisamment pour faire jaillir un beau jet vapeur/eau bouillante si on la débouche sans précaution (la pression est probablement due au faible diamètre du tube de sortie qui fait 3 mètres). Donc il faut impérativement l'éteindre "un certain temps" (30 S à 1mn) avant de l'ouvrir pour remettre de l'eau, pour laisser la résistance refroidir et la pression s'évacuer.
En dehors de ce petit problème, en l'occurrence sans conséquence, nous avons testé le système sur deux bouts de bois hier, et le cintrage se passe facilement.
Le tuyau en zinc a tendance à noircir les membrures en acacia. Si vous pouvez trouver un tuyau inox c'est mieux (ou alors il faut bricoler une caisse en bois).
En pratique, le test a été fait sur deux tasseaux de frêne et de chêne. Le chêne reste peut-être légèrement plus raide après étuvage, mais je pense que c'est jouable tout de même.
Donc je vais me mettre à chercher du bois, une fois de plus. Je vise de l'acacia, car c'est apparemment tout de même le bois de choix pour cet usage. Je pense que le fait qu'il est à peu près imputrescible doit y être pour quelque chose.
2006-01/03 15H
Mais qu'est ce qu'on nous avons bien pu faire depuis janvier ? Pas grand chose, vu que nous avons eu l'hiver paresseux, et que nous attendions par ailleurs de trouver du bois pour les membrures. Les rivets manquants ont été mis en place, la coque a été nettoyée et poncée, et une couche de vernis de protection a été passée.
2006-03-02 4H
Ployage et mise en place des premières "vraies" membrures. Le patron du chantier de la passagère, chez qui un de nos voisins et ami nautique-sévrien a fait faire le gros-oeuvre de la restauration de son bateau, a eu la grande gentillesse de nous fournir un paquet de tasseaux en acacia, juste aux dimensions, qui paraît t'il "trainait chez lui", en échange d'une offrande plus que symbolique. Merci ! Nous avons pu tranquillement mettre en place la moitié des membrures en une toute petite soirée.
2006-03-08 4H
J'ai débité les serres dans les plateaux de mélèze qui restent. Les nombreux noeuds sont très gênants, et j'ai été obligé de faire quelque scarfs pour obtenir les longueurs. Le travail manuel c'est fatiguant ai-je pu (re)constater à cette occasion.
2006-03-08 7H
Clouage des membrures mises en place la semaine dernière et début de rivetage
Pour clouer tout seul dans les zones ou je n'ai pas le bras assez long pour faire le tour, la tête de masse maintenue par un petit sac de sable fait bien l'affaire. Dans les fonds, à plat, le sac la maintient, et sur les flancs je peux la tenir à la main. Le monde est bien fait. Par contre, pour river, il faut être deux, même dans le haut des flancs. Il y a une méthode pour mettre en place la coupelle pendant l'enfoncement du clou, mais je n'y arrive pas, ma bouterolle n'est pas assez lourde.
Pour clouer et riveter, il est essentiel d'avoir un marteau d'un poids adapté à la taille des clous. Mon marteau de 650g est parfait pour enfoncer les rivets de 2,7mm, mais il est trop lourd pour les river. Le marteau de 350g fait cela tres bien (il est trop léger pour enfoncer les clous de 2,7). Par contre le marteau léger est parfait pour enfoncer les clous de 2mm, mais j'aurais du m'en procurer un plus léger pour les river, cela m'aurait évité pas mal de clous tordus.
Si le marteau n'a pas un poids adapté, le clou se tord.
2006-03-16 2H
Rivetage
2006-05-01 3H
Fin du rivetage. Une des membrures n'avait pas bien pris sa forme au fond. Une petit passage à la vapeur sur place et un cric placé sous la coque l'ont amenés à meilleure composition.
2006-05-15 12H
Mise en place et rivetage des serres de plat-bord.
J'ai fini par réussir à riveter tout seul, en perçant la tête de masse et en m'en servant comme bouterolle. Dès que l'extrémité du clou apparaît à l'intérieur de la serre, je place la coupelle dessus, puis la tête de masse (le trou en face du clou oeuf corse ...), et je continue à enfoncer le clou, qui traverse alors la coupelle. Puis rivetage, comme d'habitude.
2006-05-31 12H
Mise en place des équerres sur le tableau et la marotte. J'imagine qu'on reconnait le métier à la qualité de ces assemblages, ce qui permet de constater que je suis bien un apprenti. En l'occurence, j'ai travaillé au rabot, j'aurais peut-être mieux fait de descendre le tout au chantier pour utiliser la ponceuse lapidaire, qui facilite beaucoup les ajustages.
Mise en place de la serre de bancs. J'ai eu pas mal de soucis avec cette pièce. À l'origine elle devait faire 50mm de large, mais dans ces conditions, impossible de lui faire suivre une ligne acceptable dans la coque. Il aurait fallu la découper courbe. La marotte d'origine de Prout avait une forme beaucoup plus en U, maintenant une partie verticale plus importante vers l'avant de la coque, ce qui permet sans doute de mettre en place une serre large sans qu'elle remonte trop vers le plat-bord. Comme j'ai réduit la hauteur du U, ça ne marche pas.
À défaut, la largeur à été réduite à 25mm, ce qui paraît suffisant, et permet de cintrer la pièce dans les deux sens, pour suivre plus ou moins une ligne de rivets. J'imagine qu'on doit aussi pouvoir se passer complètement de serre sur ce genre d'embarcation, et ne garder que des sections de tasseaux pour soutenir les bancs.
Une fois les serres en place, le banc a été ajusté et posé dessus. Pas de problème particulier, sinon que l'ajustage est un peu laborieux. J'ai utilisé un gabarit pour assurer.
2006-06-02 6H
Fixation du banc arrière. Découpe et façonnage des courbes de bancs avant.
2006-06-19 15H
Fixation du banc avant et de ses équerres. Façonnage et fixation des supports de dames de nage. Vernis de l'ensemble.
2006-06-23 5H
Façonnage et fixation de baguettes de protection pour les bords de clins sous la coque. La prochaine fois j'achèterai des demi-ronds tout faits, c'est trop long à la main...
2006-06-26
Fixation d'un caillebotis fait à partir des morceaux d'acacia qui restaient après la pose des membrures. Reste à poser une défense en gros cordage, sinon c'est à peu près fini :)
2006-06-26
Et enfin, la mise à l'eau.
En conclusion
Le contrat est rempli et le bateau flotte
Le budget est d'environ 600 Euros, dont environ 300 de bois, et des montants ridiculement élevés pour la quincaillerie marine: rivets (il en reste pas mal), dames de nage, vernis, etc... C'est donc nettement plus cher que l'équivalent en plastique, même sans compter le temps de travail, le prix ne fait certainement pas partie des raisons pour se lancer dans une construction.
Je pense que nous avons travaillé environ 200 heures sur ce petit bateau... C'est long, mais il y a eu beaucoup d'hésitations et de tâtonnements, ce qui, après tout, était le but poursuivi.
Difficultés:
j'ai trouvé assez difficile le façonnage des chanfreins de recouvrement des clins, ainsi que celui des portages sur le tableau et la marotte. Il y a eu des progrès en cours de construction sur ce dernier point, mais assez peu pour les recouvrements, il doit me manquer un tour de main. Heureusement que le sicaflex assure l'étanchéité (pas une goutte ne rentre), mais celà ne durera peut-être pas éternellement, contrairement à un bon ajustage.
Ce qu'on aurait pu faire autrement:
Il avait été décidé au départ de prendre du bois de qualité relativement médiocre, pour éviter un gâchis excessif si les choses n'avaient pas marché. Évidemment, une fois le bateau obtenu, on a une certaine tendance à se dire qu'on aurait mieux fait de prendre du beau bois, mais ce n'est pas logique (mais, cher lecteur, si vous voulez vous lancer, et sachant que nous n'avons pas de dons particuliers et que vous réussirez donc également, peut-être pouvez vous tirer parti de l'enseignement et prendre un beau mélèze sans trop de noeuds, quitte à le payer un peu plus cher...).
Je ne sais pas trop quoi penser du choix que nous avons fait d'utiliser le plan de Geoffrey Prout. J'ai l'impression que, pour ce genre de petit bateau, on peut dessiner les 3 couples presque au pifomètre, et obtenir tout de même un objet qui flotte et qui avance. Est-ce qu'un plan plus soigné aurait donné un objet plus efficace? La seule manière d'en être sûr serait d'essayer (appel aux volontaires pour un rassemblement / test comparatif de petites prames à clins).